La guitare sans frontières
Avec Roland Dyens, c’est une figure majeure de la guitare qui s’en va. Très rares sont en effet les guitaristes qui parviennent à donner à cet instrument une voix. Roland fait partie de ceux-là. Comme Django Reinhardt, dont il avait repiqué la plupart des chorus dans sa jeunesse et dont il disait qu’il restait “son guitariste de chevet”, Roland avait une conception “organique” de l’instrument, transcendant les genres et les frontières. “Je suis jazz dans la tête et classique dans les doigts”, affirmait-il volontiers. S’il est resté constamment fidèle à la rigueur de sa technique classique (“j’aime la rigueur tout comme j’aime la fantaisie”, avouait-il), le génie de Roland Dyens a toujours été de suivre ses passions, qui l’ont mené, successivement et souvent simultanément, du côté de la musique brésilienne, du jazz ou de la chanson française, entre autres. Roland confiait d’ailleurs s’être senti d’emblée chez lui, “corps et âme”, lorsqu’il était allé pour la première fois au Brésil. De toutes ses passions, l’homme n’a cessé de faire reluire son instrument, en servant toujours avec la plus grande exigence l’univers classique dont il se réclamait. Sur le plan international, le rayonnement de cette très forte personnalité de la guitare était immense, honorant tous ses talents et toutes ses qualités : concertiste, compositeur, arrangeur, improvisateur, professeur au CNSMDP… “La composition, les rencontres, les études d’écriture, les belles chansons françaises, le jazz, Django, Ida Presti, le Brésil… Ils me fascinaient. Tu vois, il y a beaucoup d’ingrédients dans l’alambic !”, déclarait-il en 2009. Artiste majeur, Roland laissera également le souvenir d’une personnalité hors du commun, parmi les plus attachantes qu’il nous ait été donner de rencontrer. Artistes, amis ou simples auditeurs, tous ceux qui ont eu l’occasion de l’approcher ont pu ressentir cette vibration et cette dimension exceptionnelle. Une très grande voix de la guitare s’est éteinte.