Yamandu Costa
Un vent de fraîcheur
L’aristocratie parisienne de la six-cordes, tous styles confondus, était réunie pour saluer la venue du virtuose brésilien Yamandu Costa, le 3 décembre dernier, au New Morning. Un signe de reconnaissance qui ne trompe pas, envoyé à cet artiste exceptionnellement doué, pour qui jouer de la guitare demeure « une concentration et une joie ». (Traduction assurée « au débotté » par Vitto Meirelles).
Lorsqu’on demande à Yamandu Costa comment on devient un virtuose de la guitare, sa réponse est sans détours : « C’est un mélange d’éducation et de facilités, déclare-t-il. Une vie entière dédiée à la guitare, comme un moine ! Une recherche infinie… ». Bien sûr, grandir dans une famille de musiciens, avec un père guitariste (Algaci Costa, chef d’orchestre d’Os Fronteiriços), peut aider en quelque mesure, bien que l’instrument n’en devienne pas nécessairement plus « accessible » pour autant (« Mon père ne laissait pas les enfants toucher la guitare »). De là à penser que la vocation naîtrait de l’attrait du « fruit défendu », il n’y a qu’un pas… « Quand il sortait de la maison, en cachette, j’allais jouer de la guitare ! »
Mais évidemment, lorsqu’on voit le jour à Passo Fundo, au sud du Brésil, et que des maîtres comme Lucio Yanel (virtuose argentin installé au Brésil) fréquentent la maison, on a malgré tout quelques atouts en main ! Tout un univers de la guitare émerge, que ce soit par la richesse foisonnante du folklore et des musiques populaires (cf. par exemple la prégnance des rythmes argentins : chacareras, chamamés…), l’influence des compositeurs (Agustin Barrios, Abel Fleury, Astor Piazzola, Radamés Gnattali…) ou des grandes figures de la guitare (Dilermando Reis, Horondino José da Silva, dit « Dino 7 Cordas » – précurseur du choro à la guitare, et maître de Rafael Rabello – , ou encore Baden Powell…). Comme le dit Yamandu, « il y a beaucoup d’écoles de guitare au Brésil » !
Son instrument fétiche, c’est la guitare à 7 cordes, celle que l’on retrouve dans le choro, probablement venue de Russie (pays de naissance de la guitare à 7 cordes !). « Quand elle est arrivée au Brésil, les musiciens ont commencé à l’utiliser comme un instrument de contrepoint », explique Yamandu. Les lignes jouées par la guitare à 7 cordes viennent alors remplacer celles que jouaient auparavant les instruments plus anciens de l’orchestre brésilien (flûtes, saxophone…). D’où l’importance de la technique de pouce à la main droite, caractéristique de cette musique, bien présente dans le jeu de Yamandu. Pour l’heure, le virtuose étrenne d’ailleurs une toute nouvelle guitare, un modèle signature développé avec le luthier brésilien Joao Scremin.
Bien qu’il ait l’occasion de jouer avec des orchestres symphoniques, notamment pour interpréter un concerto de son cru, Yamandu ne sait pas écrire la musique. « Je sais lire, mais très mal ! », avoue-t-il. Pour ce genre de projet, il fait donc appel à son épouse, Elodie Bouny, elle-même guitariste, de formation classique. « J’ai fait toute la structure, et elle a fait l’orchestration », précise-t-il. Lorsqu’il compose, Yamandu privilégie la légèreté. Au besoin en enregistrant sur son téléphone ou dans son studio à la maison. « Après j’oublie, et j’en fais une autre ! » (rires). Ainsi va la guitare au Brésil, fraîche, inspirée, souvent improvisée… « C’est l’école informelle, l’école de la rue, de la nuit… c’est comme ça ! C’est une école orale, comme l’école manouche, comme le flamenco, l’école populaire ! ».
Pour transmettre cette matière musicale, Yamandu a néanmoins développé une application désormais disponible sur Apple Store ou sous Android. « Il va y avoir les albums, les vidéos, les partitions, tout ! Il faut en parler ! ».
Site : yamandu.com.br